jeudi 11 avril 2024

Chaudière-Appalaches - août 2005

St-Romuald à St-Michel-de-Bellechasse - 47 km

 Bien des événements se sont déroulés au cours de cette fin de semaine de début d'août. Thierry, Mona et la petite Maya sont arrivés de Toronto et se sont installés pour la semaine chez ma sœur Louise à St-Romuald, pendant que celle-ci nous quittait pour des vacances à Terre-Neuve en compagnie de Richard, son époux. Puis nous avons pris le traversier de Lévis pour aller passer quelques heures aux Fêtes de la Nouvelle-France qui bat son plein à Québec. Et le dimanche, nous nous sommes tous retrouvés autour de la table pour un souper de familles Blouin, Hamel, Boivin. Comme prévu, Claude et Gilles sont arrivés de Montréal au cours de l'après-midi, prêts à entreprendre l'excursion en vélo de St-Romuald à l'Île-aux-Grues.

Tôt le lundi matin, nous quittons St-Romuald par le Chemin du Fleuve et rejoignons la piste cyclable Parcours des Anses. Le temps est superbe et il fait bon pédaler le long de ce sentier qui est un des plus beaux de la région de Québec. Ah! Gilles s'arrête et puis toute la caravane aussi. Il a un problème d'aile qui frotte. Mes trois mâles font une petite chirurgie au vélo, puis nous repartons.


Fiers de leur réussite, ils s'arrêtent un peu plus loin pour prêter main forte à une cycliste fort jolie qui essaie de changer la chambre à air de son vélo. Encore une fois mes trois mâles font valoir leurs talents et posent le diagnostic «pas de crevaison mais seulement une mauvaise installation». Je commence à prier que ce soit la dernière station de mes vaillants mécaniciens car le temps file, le sentier devient de plus en plus achalandé et très peu de kilomètres ont été parcourus.

Nous voilà enfin à Saint-Étienne de Beaumont, petit village paisible qu'il est agréable de découvrir par ses petites rues paisibles. Son église est le point central du village. Elle fut érigée en 1733 sur le terrain de la première église, construite elle, en bois, en 1694. C'est à cette époque que la Seigneurie de Beaumont fut concédée par l'intendant Talon à Charles-Thomas Couillard qui y fit construire son manoir, un moulin à farine et un moulin à scie.

Le long de la route, des sculptures de bois géantes attirent notre attention. Le sculpteur étant fort affairé à sculpter un tronc d'arbre pour une œuvre future, nous n'osons pas le déranger. Cependant il nous fait signe que nous pouvons nous promener sur son terrain afin d'admirer ses œuvres et prendre des photos, ce que nous fîmes avec délice.

Nous nous arrêtons au moulin de Beaumont dans le but de le visiter, mais malheureusement pour nous il est fermé en ce lundi. Sur le bord de la route, une dame fait cuire du pain dans un ancien four de pierres. Ça sent si bon, que nous nous attablons à une table de pique-nique et nous attendons que le pain soit prêt pour en faire notre régal du midi accompagné de fromage, d'humus et de thon que nous avons dans nos sacoches.

Encore quelques côtes à monter, puis nous voilà à Saint-Michel-de-Bellechasse , village agricole et de villégiature fondé en 1678 qui jouit d'une des plus belles vues de la région. Le coeur du village offre un ensemble superbe de maisons de bois peintes en blanc, aux toits colorés et aux galeries fleuries. Mais nos préoccupations sont plus terre à terre, nous cherchons l'épicerie du village pour nous approvisionner pour le souper. Une fois trouvée, nous découvrons qu'elle tient aussi lieu de Commission des Liqueurs; les gars se gâtent sans retenue et c'est avec peine que nous réussissons à ranger toutes les victuailles et les précieuses bouteilles de vin et de bière dans nos sacoches et BOB la remorque.

En m'informant à un client à propos des terrains de camping des alentours, il m'apprend qu'il est propriétaire du camping la Tasserie et ils nous invitent à nous y arrêter. C'était justement le camping qui nous avait été recommandé et avec raison, car il est très bien aménagé, tranquille et il possède de grands arbres bien en santé. Après avoir installé les tentes, vite nous allons nous rafraîchir dans la piscine et nous promener sur la grève pour admirer le coup d'œil sur la paroisse St-Jean de l'Île d'Orléans qui trône au milieu de fleuve.

À notre retour, nous voyons arriver nos amis Gilles et Charlotte qui ont décidé de nous faire une surprise en venant passer une partie de la journée avec nous. Les taquineries des uns, les rires des autres et les souvenirs racontés avec espièglerie ont fait de cette journée un des moments les plus agréables du voyage. La soirée au coin du feu nous a rappelé les bons moments que nos deux familles ont partagés lorsque nous demeurions à Orsainville.


Le lendemain matin, nous nous mettons en route dès 7h30 afin d'arriver à temps pour prendre le traversier à Montmagny qui nous conduira à l'Île-aux-Grues. Le départ est prévu pour 10 heures mais il faut arriver au moins 30 minutes plus tôt afin de nous assurer une place sur le bateau. En peu de temps nous arrivons à Saint-Vallier , village coquet accroché au flanc d'un coteau surplombant le fleuve Saint-Laurent. Nous pédalons avec ardeur car nous avons prévu nous arrêter à la boulangerie La Levée du Jour pour déguster leur bon pain et leurs brioches en guise de déjeuner. Vous pouvez imaginer notre déception quand à la porte nous trouvons l'écriteau « Fermé les mardis ». Nous devons nous contenter des réserves rangées dans nos sacoches, puis nous poursuivons notre route.

Un endroit merveilleux nous fait oublier notre déconfiture lorsque nous arrivons près de Berthier-sur-Mer . La route nous offre une vue splendide sur le fleuve, et les résidants, amoureux de leur coin de pays, ont garni leurs propriétés ainsi que le bord de l'eau de fleurs, d'arbustes et y ont aménagé des coins repos.

La petite caserne de pompiers ne manque pas de nous séduire par sa simplicité et son harmonie avec l'environnement. Nous pensons alors à notre fils Joël, pompier de métier, qui en aurait sûrement profité pour faire un brin de jasettes avec ses confrères s'il avait été des nôtres. Nous lui laissons cette photo en souvenir. Mais le temps file et nous nous promettons de revenir bientôt nous attarder dans ce lieu de détente et de calme qu'est Berthier-sur-Mer et admirer le panorama sur les îles avoisinantes.


St-Michel-de-Bellechasse à l'île-aux-Grues - 34 km

Nous voilà enfin à Montmagny, ville que l'on nomme Capitale de l'oie blanche car elle est l'hôte de milliers de grandes oies des neiges au printemps et à l'automne. Montmagny a beaucoup de cachet car elle a su conserver plusieurs de ses bâtiments patrimoniaux et elle possède en plus quatre musées dont le Centre des migrations dédié à la grande oie des neiges. Sans trop nous attarder, nous nous mettons en ligne le long du quai et attendons patiemment notre tour pour embarquer sur le traversier Montmagny-Île aux Grues.

Dès l'ouverture de la passerelle, cyclistes et vélos prennent d'assaut le bateau. Les employés s'assurent que nous rangions nos vélos de façon ordonnée afin d'optimiser l'espace disponible. En mer, le tangage du navire m'inquiète et je garde un œil sur nos vélos chargés, prête à intervenir en cas de désiquilibre. En 25 minutes, nous sommes rendus à l'île-aux-Grues et tous les cyclistes envahissent la petite route traversant l'île qui conduit au village. Les habitants de l'île ne doivent sûrement pas se sentir maîtres chez eux lorsqu'arrivent les touristes en saison estivale.

Nous empruntons la rue Principale pour nous rendre au camping municipal de l'île situé au sommet d'une colline juste à côté de la volière. Il est assez rudimentaire, mais bien aménagé et agrémenté de beaux arbres matures. Nous installons nos tentes à l'ombre et partons explorer l'île. Un fort vent s'est levé, enfin selon nos critères car les insulaires le considèrent moyen, ce qui rend notre excursion plus difficile.

Nous faisons un arrêt au Moulin de l'Île où une guide très connaisseur de son patrimoine nous parle de la vie des habitants de l'île, de leurs ancêtres et de leurs coutumes telles les fêtes de la Mi-Carême. Durant le temps de la Mi-Carême, les gens de la région se déguisaient et visitaient familles et amis. C'était la tâche des résidants de la maison de deviner la personne qui se cachait sous le déguisement. Ceci occasionnait une soirée de plaisir à une période de l'année où les sacrifices étaient de rigueur.

Serge et moi continuons seuls l'exploration de l'île tandis que Gilles et Claude partent dans une autre direction. Poussés par le vent, nous pédalons joyeusement, saluant au passage nos confrères cyclistes et les habitants de l'île. L'extrémité de l'île est couverte de champs où paissent paisiblement des troupeaux de vaches et où les fleurs sauvages parfument l'air et ondulent allègrement au vent nous laissant admirer leur chaud coloris.

Au bout de l'île à l'est se cache le manoir seigneurial McPhearson où le célèbre peintre québécois Jean-Paul Riopelle a passé les dernières années de sa vie.

Nous revenons ensuite vers le centre de l'île, faisons un arrêt à la fromagerie pour déguster leurs fameux fromages puis partons vers l'ouest jusqu'au Bateau Ivre qui est emménagé en salle de réception et en salle à manger. Ce bateau a été transporté il y a plusieurs années de Sorel à la grève de l'Île-aux-Grues par un habitant de l'île qui voulait doter son île d'un attrait touristique particulier.

Mon petit doigt me disait que nous avions de grandes chances d'y retrouver Gilles et Claude en train de siroter une bonne bière et je ne m'étais pas trompé. Nous les rejoignons donc et faisons la fête avant de repartir, un peu pompette, vers le terrain de camping mais non sans avoir réservé au préalable nos places pour un souper à saveur canadienne à la salle à manger située au 2e étage.

De retour au camping, nous faisons une heureuse rencontre. En me dirigeant vers les toilettes, je croise un campeur cycliste qui me semble familier. Au son de sa voix, je reconnais tout de suite un ami d'enfance, Gilles Boily, qui a grandi dans la même rue que Serge et moi. Ce sont des retrouvailles qui font surgir dans nos mémoires bien des souvenirs de jeunesse. En soirée, nous veillons tous ensemble au coin du feu en nous racontant des anecdotes du temps passé, en parlant du cheminement de nos vies d'adulte. Même les moustiques, qui foisonnent en cette chaude nuit d'été, n'arrivent pas à porter ombrage à notre bonne humeur. En retournant à notre tente pour la nuit, je remarque que de nouvelles tentes ont poussé autour de nous durant notre absence.

Île-aux-Grues à St-Romuald - 75 km

Nous nous levons sous un ciel gris mais heureusement il ne pleut pas et nous espérons pouvoir plier bagages au sec. Nous découvrons enfin qui sont nos nouveaux voisins. Il s'agit d'Alain, Lucie et leur chien Mirka que nous avions rencontré à St-Ours la semaine précédente. Décidemment c'est le temps des retrouvailles. C'est avec un immense plaisir que nous les revoyons et partageons ensemble les expériences vécues au cours des derniers jours. Nous prenons ensuite le déjeuner avec Gilles qui décide de se joindre à notre groupe pour le retour vers Québec.

9 h 45 tout le monde se retrouve sur le quai, prêt à embarquer sur le traversier qui nous ramène à Montmagny. Après un arrêt à l'épicerie IGA pour nous approvisionner pour le dîner, nous empruntons le chemin des Poiriers, puis le chemin St-François Ouest. Un fort vent de face nous ralentit et les kilomètres s'accumulent lentement et péniblement. Enfin! Nous arrivons au village de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud où nous décidons de nous arrêter pour pique-niquer encore une fois près de l'église et du presbytère.


L'endroit est magnifique et le parc entourant l'église et le presbytère regorge de fleurs et d'arbustes. Il faut souligner que le presbytère est le plus vieux, encore existant, de la rive sud. Il date de 1763 et illustre bien l'architecture de transition entre l'influence du Régime français et celle du néoclassicisme.

Au lieu de rejoindre la route 132 par la route de Beaumont, nous décidons de modifier notre itinéraire et de passer par La Durantaye afin de nous rendre à Saint-Michel-de-Bellechasse où nous avons l'intention de nous procurer de bonnes bouteilles de vin pour célébrer la fin de notre voyage. Erreur ! Les côtes de La Durantaye sont ardues et semblent se multiplier sans fin. De plus, il n'y a pas d'accotement et la route 281 est celle utilisée par les camionneurs pour rejoindre l'autoroute 20. Par contre, lorsque nous atteignons le sommet des côtes, une vue superbe sur le village Saint-Michel et sur l'Île d'Orléans au milieu du fleuve est la récompense suprême. Nous prenons quelques moments pour admirer ce décor magnifique et reprendre notre souffle.

Nous nous approvisionnons pour le souper à l'épicerie du village, puis nous continuons notre route vers Beaumont jusqu'au Camping Guillemette. La jeune fille à l'accueil veut nous charger 40$ pour la nuit mais grâce au sens de la négociation de Gilles Boily, notre nouveau compagnon, il arrive à faire diminuer le prix à 28$.

Après l'installation des tentes, nous nous retrouvons tous autour de la table et dégustons avec appétit un bon spaghetti italien accompagné de fromage et de pain le tout arrosé de beaucoup de vin. Inutile de vous dire que nous étions fort joyeux, même au moment de faire la vaisselle lorsque Gilles s'est éclipsé pour aller faire un petit roupillon sous la tente.

Pour notre dernier déjeuner, les provisions devenant de plus en plus maigres, nous tentons de faire des crêpes à la farine de sarrasin, mais cela s'est avéré un désastre. Il me faudra améliorer la recette pour la prochaine fois, si mes compagnons veulent bien me donner une autre chance pour démontrer mes talents culinaires.

Au moment de démonter les tentes, Serge cause tout un émoi. En enlevant un piquet de tente, un puissant jet d'eau surgit du sol et ne cesse de jaillir. Il réalise alors qu'il avait planté le piquet dans le tuyau d'alimentation d'eau. Il s'empresse à mettre une grosse pierre sur le tuyau pour arrêter l'inondation et nous permettre de démonter nos tentes au sec. Nous avertissons les propriétaires qui ne semblent pas trop surpris, puis nous quittons le camping.

Ils nous restent encore plusieurs côtes à monter avant d'arriver à Lévis et rejoindre la piste cyclable le Parcours des Anses. Gilles (Aubé) et Claude semblent avoir pris goût aux côtes car il dépasse la rue St-Joseph et pédalent avec ardeur pour atteindre le sommet d'une nouvelle côte. C'est Gilles (Boily) qui se charge d'aller les rattraper et les ramener sur la bonne route. Décidément, il a des réserves d'énergie inépuisables notre ami Gilles.

Le Parcours des Anses à la hauteur de Lévis nous offre de merveilleux coups d'œil sur la ville de Québec. La vue du Château Frontenac au haut du Cap Diamant est toujours saisissante de beauté et malgré que Serge et moi ayons grandi dans ce décor, nous ressentons toujours le même plaisir à le contempler sous tous ses angles Château Frontenanc à Québec

Un voyage que nous avons commencé à trois se termine à cinq et quel plaisir se fut de partager ensemble ses moments de camaraderie, de découvertes et d'efforts. En treize jours nous avons parcouru 550 kilomètres, ce qui n'est certainement pas un record, mais sûrement une bonne moyenne de moments heureux et de souvenirs qui resteront gravés dans nos mémoires pour longtemps. Je souhaite que nous aurons encore d'autres occasions de découvrir ensemble des coins de notre pays et que Gilles (Aubé) récupérera rapidement de ses problèmes de santé survenus cet hiver.


Suite - Bas St-Laurent 

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